Voir Tanya Tagaq en live est un choc, une expérience forte qui laisse une trace indélébile à tous les coups. On parle ici d’une musique purement instinctive, totalement audacieuse et affranchie de tout code. Née au Nunavut, l’extrême nord du Canada, Tanya porte en elle une partie de cet univers froid et hostile, où il fait noir trois mois par an et où la culture inuit s’est développée au contact de la nature et de la faune ambiante. Le kattajaq est une tradition inuit où deux femmes, proches l’une de l’autre, se répondent avec un bruit de gorge et de halètements, dans une sorte de compétition.
La musique de Tanya Tagaq vient de là, mais en est à la fois très éloignée. Un jour sa mère lui remets une cassette contenant des enregistrements de musique traditionnelle. Cela provoque en elle un grand départ. Elle a appris le chant de gorge, et s’est approprié des techniques pour finalement pouvoir s’en éloigner tout en conservant un lien étroit et un amour infini pour sa culture. Tanya Tagaq s’est d’ailleurs fermement opposée à la manière dont – jusqu’à tout récemment et peut-être encore – l’Occident prenait position contre les cultures ethniques, contre l’oppression de son peuple, mais aussi contre les restrictions imposées à la chasse au phoque, l’une des plus importantes sources de nourriture et de revenu des Inuits, contre la détérioration, le problème de l’alcoolisme et de la toxicomanie, la maltraitance des femmes et des filles et le taux de suicide alarmants chez les jeunes Inuits, une conséquence directe du désespoir de leur situation.
Cet engagement politique et social se reflète dans les forces naturelles furieuses, presqu’animales (au premier sens du terme), que Tanya Tagaq déchaîne lors de ses représentations. Des cris fantomatiques, un profond grondement. Son chant et sa performance sur scène ressemblent à un rituel chamanique effrayant. Impressionnant et littéralement à couper le souffle.
Tagaq a collaboré avec Björk et avec le Kronos Quartet. Elle a remporté le prestigieux prix de la musique Polaris en 2014 avec son album Animism. En 2015, elle a remporté le prix Juno du meilleur enregistrement autochtone de l’année – bien que pour nous sa musique soit de mille manières très loin d’être ‘autochtone’ au sens d’’exotique’. Elle est accompagnée du phénoménal percussionniste Jean Martin et du violoniste folk Jesse Zubot, tous deux munis d’une lourde artillerie électronique, Christine Duncan au theremin et Felipe Ugarte et Naia Gillis au txalaparta. Tous ses concerts sont improvisés et nous invitent à vivre une expérience qui transcende tous les styles et tous les genres.
- Tanya Tagaq : chant
- Jean Martin : batterie
- Jesse Zubot : violon
- Christine Duncan : theremin
- Felipe Ugarte : txalaparta
- Naia Gillis : txalaparta